Alimentation et risque de cancer et de maladie– Résultats de la plus grande étude 2010

Les règles diététiques préconisent de consommer des graisses avec modération et d’inclure dans notre alimentation beaucoup de fruits, de légumes et de céréales. Les récents résultats de la plus grande étude portant sur la modification du régime alimentaire jamais réalisée n’ont pas démontré les effets bénéfiques de telles recommandations par rapport au risque de développer un cancer ou une maladie cardiovasculaire (MCV). Ou bien est-ce le cas ? En réalité, les résultats de cette étude majeure nécessitent d’être interprétés avec beaucoup de précaution..

Le procès fait aux graisses et la valorisation des fruits et légumes

Les scientifiques ont longtemps suspecté qu’un haut niveau de graisses dans notre alimentation augmentait le risque de cancer du sein, leur raisonnement se basant sur les résultats d’études réalisées en laboratoire et l’observation de populations parmi lesquelles des groupes de personnes consommant moins de graisses développaient moins la maladie. D’autres types d’études, bien que moins concluantes, tendaient vers la même conclusion. De même, l’hypothèse selon laquelle un régime pauvre en graisses et riche en légumes, fruits et fibres protège du cancer colorectal est avancé. Les preuves restent cependant très minces.

Les graisses jouent très probablement un rôle négatif dans les maladies de cœur, mais les coupables sont les graisses saturées et les acides gras trans; les graisses insaturées et en particulier l’huile de poisson ayant des vertus protectrices.

A la recherche d’une réponse définitive

Malgré les nombreuses preuves d’une influence du régime alimentaire sur la survenue de cancers et de maladies cardiovasculaires, peu d’études établissent le lien de cause à effet. Pour obtenir des preuves probantes de celui-ci, la mise en place d’une étude d’intervention contrôlée semble la plus adaptée. Il s’agit d’une étude comparative dans laquelle un groupe dit « d’intervention » change de régime alimentaire et un groupe de référence qui lui, ne change rien à ses habitudes alimentaires (groupe de contrôle). Tous les effets observés sont imputables au changement de régime.

C’est pourquoi l’étude du Mouvement pour la Santé de la Femme (WHI) revêt une importance toute particulière. Cette étude contrôlée a été conduite auprès de 48 835 femmes âgées de 50 à 79 ans, suivies durant 8 ans. Le groupe d’intervention a participé à un programme intensif de modification du comportement. La consommation de graisses initiale du groupe représentait 38% des besoins énergétiques. La diminution de ces apports a été fixée à un quart de cette consommation, passant de 38% à 27-30%, et ce pendant au moins 6 ans. Ceci s’est également accompagné d’une augmentation modérée de la consommation de légumes, fruits et de céréales.

En y regardant de plus près

Les taux de cancer du sein, du colon et des maladies cardiovasculaires telles que maladies des artères coronaires (MAC) ou infarctus n’ont varié que très peu entre les deux groupes. Bien que les différences observées ne soient pas statistiquement significatives, il serait hâtif de conclure que l’alimentation n’a pas d’effet sur le développement de cancers ou de MCV.

Cancer

Dans l’ensemble, les résultats étaient cohérents avec les preuves précédentes, en l’occurrence les femmes qui consommaient beaucoup de graisse initialement et qui ont diminué leur consommation, tout en respectant parallèlement la proportion recommandée en légumes, ont vu le risque développer certaines tumeurs de la poitrine diminuer. La réduction du risque de cancer du sein (réduction significative pour tous les participants du groupe d’intervention) est plus forte que celle du cancer du colon.

MCV

Une plus forte réduction du risque de MCV a été observée chez les femmes ayant le plus réduit leur consommation de graisses saturées. La conclusion de l’étude, en ce qui concerne le risque de MAC, doit être interprétée avec prudence étant donné que la modification du régime alimentaire dans l’étude ne reflète pas totalement les actuelles recommandations diététiques. Par exemple, aucune réduction des apports en graisses saturées avec maintien ou augmentation de la consommation de graisses bénéfiques n’a été testée. Cependant, les résultats renforcent le principe selon lequel un changement portant sur l’absorption de graisses qui entraine une baisse du taux de cholestérol LDL est bon pour le cœur.

Raisons possibles d’un effet limité

La modification du régime alimentaire réalisée dans cette étude est mesurable car celle-ci a conduit à diminuer d’un quart la consommation totale des graisses. Les effets observés sur certains types de cancer du sein et MVC seulement peuvent donc sembler modestes, voire décevants. Deux explications sont possibles, la première étant que la non-optimisation de l’absorption d’éléments nutritifs spécifiques (par exemple le type de graisses) pourrait s’avérer avoir des effets plus importants. La seconde pouvant être que les bénéfices d’un régime alimentaire pourraient se cumuler pendant toute une vie et/ou avoir plus d’impact lorsqu’il a lieu au cours de la première moitié de la vie.

References

  1. Prentice RL et al. Low-Fat Dietary Pattern and Risk of Invasive Breast Cancer: The Women's Health Initiative Randomized Controlled Dietary Modification Trial. JAMA. 2006; 295: 620-642.

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  1. Howard BV et al. Low-Fat Dietary Pattern and Risk of Cardiovascular Disease: The Women's Health Initiative Randomized Controlled Dietary Modification Trial. JAMA. 2006; 295: 655-666.

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