Cancer de la prostate : un médicament prometteur

Un nouveau médicament hormonal, l'acétate d'abiratérone, aurait permis d'obtenir des résultats certes préliminaires, mais intéressants.

Le cancer de la prostate frappe 50 000 hommes de plus par an en France, avec une fréquence qui augmente d'année en année, comme dans tous les pays industrialisés, du fait d'un dépistage qui se généralise et du vieillissement de la population. Le traitement pour les formes très localisées fait appel, selon l'âge, à la chirurgie ou à la radiothérapie, et peut pour les hommes âgés, se limiter parfois à une simple surveillance. Dans certaines formes, un peu plus évoluées ou en cas de contre-indication aux autres thérapies, (20 % des cas diagnostiqués, soit 10 000 patients par an), un traitement antihormonal est instauré.

Le cancer de la prostate est hormono-dépendant, c'est-à-dire qu'il est alimenté par les hormones mâles secrétées principalement par les testicules et à un moindre degré par les glandes surrénales. L'objectif du traitement hormonal est de «couper les vivres» de la tumeur, par inhibition de la production d'androgène. Les principales antihormones disponibles sur le marché bloquent, en agissant au niveau de l'hypophyse et de l'hypothalamus, la production de testostérone. Mais d'autres types de médicaments anti-androgènes sont aussi utilisés. Le problème avec les traitements actuels, c'est que l'inhibition de la sécrétion hormonale est parfois précédée d'un effet rebond, avec une période de surstimulation, et que, de surcroît, ils n'agissent pas toujours sur les androgènes secrétés aussi par les surrénales.

«Une molécule capable de bloquer les hormones mâles»

L'Institut national du cancer en Grande-Bretagne vient de publier dans The Journal of Clinical Oncology les résultats très encourageants, quoique préliminaires, d'un essai clinique de phase 1 obtenu avec une nouvelle molécule anti-androgène, l'acétate d'abiratérone, mise au point par une firme de biotechnologie américaine, Cougar Biotechnology. Ce nouveau médicament a un mécanisme d'action totalement innovant, car il vise pour la première fois à agir dès le début de la chaîne, en empêchant la transformation du cholestérol en androgènes. Il faut savoir en effet, que les hormones mâles sont fabriquées dans l'organisme par transformation du cholestérol, par le biais de différents systèmes enzymatiques, et notamment l'enzyme CYP17. Ce nouveau médicament serait donc capable de bloquer toute la production d'androgènes dans l'organisme, en inhibant de manière sélective l'enzyme CYP17.

L'étude dite de phase 1 publiée cette semaine porte sur 21 patients atteints d'un cancer agressif de la prostate et traités par différentes doses de ce médicament. Les résultats montrent d'abord une très bonne tolérance. Ils font surtout état d'une chute des taux de testostérone, d'androgènes et d'œstradiol chez tous les patients. Le taux de PSA (un marqueur du cancer de la prostate) aurait baissé de plus de 50 % chez la majorité des patients pendant des périodes allant de 69 à 578 jours. Selon les auteurs, pour un nombre important de patients, une régression radiologique de la tumeur a été observée, associée à une amélioration des symptômes et un moindre recours à des médicaments antalgiques.

«Il s'agit effectivement d'une molécule originale qui pourrait avoir un effet de blocage complet des hormones mâles, même si on reste dans le même concept de l'hormonothérapie initié il y a plus de 60 ans. Néanmoins, les données sont encore trop limitées pour connaître les bénéfices réels que l'on pourra obtenir avec ce médicament», affirme le professeur Marc Zerbib (urologue, hôpital Cochin, Paris). Même écho de la part du professeur Guy Vallancien (Institut mutualiste Montsouris, Paris) : «Pour l'instant, il s'agit de résultats très préliminaires, avec peu de recul, sur un nombre limité de personnes. Il ne faut pas que les patients se précipitent chez leur médecin pour réclamer ce médicament qui d'ailleurs n'est pas disponible.» Une nouvelle étude en cours sur 1 200 patients devrait être publiée dans les mois qui viennent.

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