CONFERENCE TRAITEMENT CANCER DU COLON 2010

Introduction

En France, le cancer colorectal (CCR) est le plus fréquent des cancers dans l’ensemble de la population. Les données d’incidence fournies par le réseau français des registres de cancers permettent d’estimer à 33 500 environ le nombre de nouveaux cas par an dont 21 500 (65%) sont des cancers du côlon (CC).
L’âge moyen lors du diagnostic est d’environ 70 ans. Le nombre de décès par CCR est de l’ordre de 15 000 à 16 000 par an. Le CCR est rare avant 50 ans (moins de 6% des cas). L’incidence augmente rapidement à partir de cet âge.
Le taux d’incidence du CC a augmenté régulièrement de 1970 à 1990 ; il semble actuellement se stabiliser. En revanche, le taux de décès est resté stable durant les 20 dernières années. Le pronostic s’est donc amélioré. Le taux de survie brute à 5 ans en France est estimé à 41%, le taux de survie relative *1 à 53%.
L’immense majorité des CCR sont des adénocarcinomes. Dans les pays occidentaux, 60 à 80% des CCR, en particulier les localisations distales, résultent de la transformation d’un adénome. Les adénomes se répartissent à peu près également entre le côlon droit *2 et le côlon gauche. En revanche, un tiers seulement des CCR sont situés dans le côlon droit.
Selon les données d’autopsie, un tiers de la population est porteur d’un adénome à l’âge de 65 ans. Sur 1000 adénomes, 100 atteindront la taille de 1 cm et 25 deviendront des cancers dans un délai de 10 à 20 ans. Outre la taille, le risque de transformation dépend de la structure histologique. La présence de foyers cancéreux dans les adénomes tubuleux est de 1,3%, de 11,6% dans les adénomes tubulo-villeux et de 14,4% dans les adénomes villeux. Il arrive exceptionnellement (0,3%) que des adénomes de petite taille subissent directement une transformation cancéreuse.
Après exérèse par polypectomie endoscopique, les adénomes peuvent récidiver. Le taux de récidive à 3 ans des adénomes de plus de 1 cm de diamètre se situe autour de 3%. Il est maintenant démontré que la polypectomie endoscopique diminue la mortalité et l’incidence du CCR.
Dans la population, on identifie trois niveaux de risque de CCR :

  • Le niveau moyen :

On le définit comme le risque moyen de la population dans son ensemble et on le mesure par le risque net moyen *3 d’être atteint d’un CCR avant l’âge de 74 ans. Il est estimé à 3,5%.

  • Le niveau élevé :

Il est défini comme le risque des sujets ayant des antécédents personnels d’adénome ou de CCR ou celui des sujets ayant un ou plusieurs parents du premier degré atteints d’un CCR ou d’un adénome de plus de 1 cm. Chez ces derniers, le risque net avant 74 ans varie de 6 à 10% selon le nombre de parents atteints et l’âge minimum auquel la maladie a été découverte chez les apparentés. Les sujets atteints de maladie inflammatoire chronique de l’intestin, Rectocolite Ulcéro-Hémorragique (RCUH) et maladie de Crohn, sont aussi des sujets à risque élevé en cas de pancolite.

  • Le niveau très élevé :

Il est caractérisé par le risque des sujets appartenant à une famille atteinte de cancers à transmission héréditaire autosomale dominante.
Un peu moins de 1% des CCR sont dus à la Polypose Adénomateuse Familiale (PAF). Selon les études, 1 à 5% des CCR sont des cancers héréditaires sans polypose (HNPCC) *4, nouvelle dénomination du syndrome de Lynch.
Ainsi le CC est un problème de santé publique par sa fréquence et sa gravité.
L’espoir d’une prévention primaire simple et facilement applicable, les controverses à propos des stratégies de dépistage, les disparités constatées dans les pratiques diagnostiques, thérapeutiques et dans les modalités de surveillance ont justifié la tenue d’une Conférence de Consensus les 30 et 31 janvier 1998 à Paris.

Durant cette Conférence, le jury a répondu aux 6 questions suivantes :
- La prévention primaire du cancer colorectal est-elle possible ?
- Le dépistage du cancer colique est-il possible et utile ?
- Quelles sont les explorations utiles au diagnostic et à la décision thérapeutique ?
- Quels sont les standards du traitement à visée curative ?
- Que faire après exérèse à visée curative d’un cancer du côlon ?
- Quel traitement proposer dans les cancers coliques localement avancés et/ou métastatiques ?

Les deux premières questions relatives à la prévention et au dépistage concernent le CCR dans son ensemble. Les quatre dernières questions relatives au diagnostic, au pronostic, à la surveillance et au traitement concernent le côlon à l’exclusion du rectum. Le cancer du rectum a fait l’objet d’une Conférence de Consensus, les 1 et 2 décembre 1994, dont les conclusions ont été publiées en 1995.


La prévention primaire du cancer colorectal est-elle possible ?

Les études expérimentales et épidémiologiques suggèrent le rôle de facteurs d’environnement dans la survenue du CCR.

1 Rôle de l’alimentation

Les résultats des études cas-témoins et de cohorte sont discordants. L’effet néfaste des viandes et des graisses n’a été observé que dans une minorité d’études. L’effet protecteur des légumes et l’effet néfaste d’un apport excessif de calories sont les faits les mieux établis. Les études d’intervention sur les vitamines anti-oxydantes n’ont pas montré d’effet protecteur. Celles concernant les fibres alimentaires sont en cours. Un effet protecteur de l’activité physique a été mis en évidence.

Recommandations :
Compte-tenu du niveau de preuves actuelles, les recommandations ne peuvent se limiter qu’à des conseils d’hygiène générale : augmentation de la consommation de légumes, réduction globale des apports caloriques et augmentation de l’activité physique.

2 Aspirine et anti-inflammatoires non stéroïdiens non salicylés (AINSNS) :

L’effet protecteur de l’aspirine et des AINSNS, suggéré par des études de cohortes de malades atteints de polyarthrite rhumatoïde, a été confirmé par l’expérimentation animale. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens bloquent l’initiation et la croissance des adénomes. Des études épidémiologiques (de cas-témoins et de cohorte) ont montré qu’une prise prolongée pendant 10 à 20 ans est nécessaire pour que l’effet apparaisse ; il n'est que suspensif et disparaît à l’arrêt de la prise du produit.
Dans la PAF, le sulindac diminue le nombre et la taille des adénomes. L'effet n'est que suspensif. Mais des observations de cancer rectal apparu sous sulindac en limitent l'intérêt et incitent à la prudence.

Recommandations :
Le jury estime que le niveau de preuves est actuellement insuffisant et les effets secondaires potentiels trop importants pour recommander la généralisation de la prise d’aspirine comme méthode de prévention du CCR ou des AINSNS dans les adénomes sporadiques et la PAF.


Le dépistage du cancer colique est-il possible et utile ?

1 Dépistage chez les sujets à risque moyen

Deux études contrôlées et randomisées réalisées dans la population générale chez des personnes âgées de 45 à 74 ans, ont démontré qu'un programme de dépistage basé sur le test Hemoccult II® répété tous les deux ans et suivi de coloscopie en cas de positivité, peut diminuer la mortalité par CCR de 15 à 18%, 8 à 10 ans après sa mise en place. Une étude semblable est en voie d’achèvement en Bourgogne. Le test Hemoccult II® permet de dépister environ 50% des cancers et 20% des adénomes de plus de 1cm. Pour obtenir ces résultats ainsi qu’une valeur prédictive positive acceptable, le test Hemoccult II® doit être réalisé dans le cadre d’un programme régulièrement évalué ; sa lecture doit être centralisée et effectuée par des équipes entraînées. La participation de la population concernée doit être d'au moins 50% et maintenue pendant toute la durée du programme. Pour atteindre cet objectif, la collaboration des médecins généralistes et des médecins du travail est indispensable.
La rectosigmoïdoscopie souple et la coloscopie totale ont une sensibilité élevée, mais ne satisfont pas aux critères d'acceptabilité et d'innocuité d’un test de dépistage de masse.

Recommandations :
Le dépistage du CCR est possible par la recherche de saignement occulte dans les selles, dans le cadre de campagnes de dépistage de masse soumises à des conditions strictes de réalisation. Son efficacité pour les sujets à risque moyen ne pourra être définitivement affirmée en France qu'après l’examen des résultats de l'étude bourguignonne et après la démonstration de sa faisabilité par des études pilotes. Il est conseillé de les réaliser rapidement dans des départements aptes à respecter un cahier des charges précis, et de préférence là où il existe un registre du cancer.
Le dépistage du CCR par la recherche du sang occulte dans les selles ne saurait être proposé à titre individuel par un médecin à son patient en dehors du cadre de campagnes de dépistage organisées.
La demande individuelle formulée par un patient doit être appréciée dans le cadre de la relation médecin-malade, en fonction des facteurs de risque. Elle ne relève en aucun cas du dépistage.

2 Surveillance des sujets à risque très élevé ou élevé

2.1 Risque très élevé

Les sujets appartenant à une famille atteinte de PAF ou de CCR héréditaire sans polypose (HNPCC) sont potentiellement à risque très élevé. Ces maladies sont identifiées cliniquement et sont transmises sur le mode autosomal dominant. Les techniques de biologie moléculaire peuvent permettre d’identifier les mutations constitutionnelles délétères. 1% des CCR sont atteints de PAF et 1 à 5% de HNPCC. Cette dernière maladie est identifiée par la réunion des trois critères d'Amsterdam : 1) trois sujets sont atteints de CCR dont l’un est uni aux deux autres par un lien de parenté au premier degré , 2) deux générations successives sont concernées, 3) chez un des malades, le diagnostic d'un CCR a été porté avant l'âge de 50 ans.
Elle peut impliquer un risque élevé de cancers de l’endomètre et de l’ovaire, d’autres cancers digestifs et des voies excrétrices urinaires.

Recommandations :
Elles sont fondées sur des consensus d'experts et de rares études contrôlées :
Proposition d’une consultation de génétique oncologique.
- Recherche de la mutation chez le sujet index et chez les apparentés après leur consentement.
- Les sujets ayant bénéficié d’un test génétique et non porteurs de la mutation familiale doivent être suivis comme la population générale.
- La mise en place de laboratoires de biologie moléculaire chargés de rechercher les mutations en routine est souhaitable. Les prélèvements histologiques doivent être fixés dans du formol.
- Dans la PAF, la détection se fait par la rectosigmoïdoscopie souple annuelle à partir de la puberté jusqu'à l'âge de 40 ans où l'expressivité de la maladie est voisine de 1.
- Dans le HNPCC, remplissant les critères d’Amsterdam, les recommandations internationales actuelles de surveillance sont les suivantes :

  • Coloscopie totale tous les 2 ans dès l'âge de 25 ans ou 5 ans avant l'âge au moment du diagnostic du cas le plus précoce dans la famille.
  • Examen gynécologique annuel après l’âge de 30 ans avec échographie endo-vaginale complétée d'un frottis aspiratif.

La surveillance des autres cancers digestifs ou des voies urinaires ne fait pas l'objet de consensus clair du fait de leur moindre fréquence.

2.2 Risque élevé

15 à 20 % de patients atteints de CCR sporadique ont eu un parent atteint. Un seul cas de CCR chez un parent au 1er degré (parent, fratrie, enfant) multiplie le risque personnel par 2. Cependant :
- si le parent est âgé de moins de 45 ans au diagnostic, le risque relatif est multiplié par 4 alors qu'il est voisin de celui de la population générale si ce parent avait plus de 60 ans.
- si deux parents du premier degré ont été atteints d'un CCR quel que soit leur âge le risque relatif est également multiplié par 4.

Deux études suggèrent que les sujets ayant un parent au premier degré atteint d’adénome de taille supérieure à 1 cm ou d’adénome diagnostiqué avant l’âge de 60 ans ont un risque relatif de CCR multiplié par 2.

Recommandations :
Il est conseillé une coloscopie de dépistage chez tout apparenté au premier degré d'un malade atteint de CCR avant 60 ans, ou si deux parents au premier degré sont atteints d'un CCR quel que soit l'âge du diagnostic. La coloscopie est faite à partir de 45 ans ou 5 ans avant l'âge du diagnostic du cas index . Après une coloscopie normale, une surveillance tous les 5 ans est suffisante. En cas de CCR après 60 ans chez le sujet index, il est difficile de conseiller une stratégie dans l'état actuel des connaissances.
Le risque théorique lorsque les apparentés ont des adénomes, même si leur taille est supérieure à 1cm, n’atteint pas un niveau de preuve suffisant pour que le jury puisse faire une recommandation sur la stratégie de dépistage à utiliser.

2.3 Sujets à risque élevé du fait d'antécédents personnels

Les sujets ayant des antécédents personnels d’adénome, de CCR ou de maladie inflammatoire de l’intestin (RCUH et maladie de Crohn) sont également à risque élevé.

Recommandations :
Dans le cas d’antécédents de CCR ou d’adénome supérieur à 1 cm, d’adénomes avec contingent villeux, une coloscopie est effectuée à 3 ans et, si la coloscopie est normale, 5 ans après.
En cas de pancolite, une coloscopie est conseillée tous les 2 ans après quinze à vingt ans d’évolution de la maladie.


Quelles sont les explorations utiles au diagnostic et à la décision thérapeutique ?


La coloscopie permet le diagnostic du cancer, des lésions associées et l’exérèse des adénomes. Sa sensibilité (95%) et sa spécificité sont supérieures à celles du lavement baryté en double contraste. Elle est contre-indiquée dans les syndromes occlusifs aigus. Cependant lorsque la coloscopie est contre-indiquée, de réalisation difficile ou incomplète (sujets âgés, patients avec pathologies multiples), le lavement opaque garde toute sa place.

Recommandations :
La coloscopie est l’examen de référence. Il est indispensable d’obtenir en pré ou post-opératoire (en ce cas dans les 3 à 6 mois suivant l’intervention), une exploration colique complète, avec diagnostic et traitement par exérèse endoscopique des adénomes existants.
L’opacification radiologique doit se limiter aux occlusions aiguës ou en complément d’une coloscopie incomplète dont l’échec est d’origine technique.
Il n’est pas souhaitable de pérenniser une pratique où les deux explorations sont encore faites dans plus d’un quart des cas.
Le bilan préthérapeutique débute par l’étape clinique (antécédents personnels et familiaux de CCR, d’adénomes et d’autres cancers, examen clinique). Les examens biologiques dont l’antigène carcino-embryonnaire (ACE) ne modifient pas l’attitude thérapeutique. L’échographie abdominale pour la recherche de métastases hépatiques (MH) et la radiographie pulmonaire sont les deux examens paracliniques à réaliser. La tomodensitométrie (TDM) et l’imagerie par résonance magnétique (IRM) ne peuvent pas être des examens de première intention malgré l’amélioration de leurs performances.

Recommandations :
Le bilan pré-thérapeutique standard à effectuer, en l’absence de signe clinique évocateur de métastases à distance, est limité à :
- la recherche d’antécédents familiaux et l’examen clinique,
- l’échographie abdominale,
- la radiographie pulmonaire.


Quels sont les standards du traitement à visée curative ?

1 Traitement chirurgical

1.1 Le traitement chirurgical électif : les règles carcinologiques n’apparaissent pas toujours consensuelles dans les pratiques.

Recommandations :
Le choix de la voie d’abord doit permettre une exploration complète de la cavité abdominale (foie, pelvis). Tout nodule suspect est biopsié.
Le traitement chirurgical des CC non compliqués est l’exérèse de la tumeur primitive avec des marges de côlon sain (minimum 5cm). La ligature des vaisseaux à l’origine permet une exérèse large du mésocôlon et des ganglions lymphatiques de drainage. La ligature première des vaisseaux, l’exclusion endoluminale et la préparation des berges anastomotiques avec une solution « tumoricide », n’ont jamais fait la preuve de leur efficacité ou n’ont jamais été évaluées.
Le type de l’exérèse colique est conditionné par la topographie tumorale. Les cancers du côlon gauche sont traités indifféremment par hémicolectomie gauche vraie ou colectomie segmentaire.
La chirurgie colique sous coelioscopie a fait la preuve de sa faisabilité, mais cette technique ne peut être proposée dans les exérèses à visée curative en dehors d’études randomisées.

1.2 Chirurgie en situation d’urgence : plusieurs éléments interviennent dans la décision : état général des patients, pronostic carcinologique, expérience du chirurgien en chirurgie colorectale. Une intervention différée de quelques heures peut être préférable à une intervention en urgence lorsque les conditions optimales (équipe, préparation) ne sont pas réunies.
Occlusion : elle complique 10 à 15% des cancers du côlon.

Recommandations :
Cancers du côlon droit et du transverse : ils sont traités dans la majorité des cas par une hémicolectomie droite, élargie au besoin vers la gauche.
Cancers du côlon gauche :
- La colostomie première par une voie élective est la méthode de référence. Elle est réalisable chez tous les patients. La stratégie en 2 temps doit être préférée chaque fois que possible à celle en 3 temps. La place de l’intervention de Hartmann paraît réduite.
- La colectomie segmentaire avec lavage colique per-opératoire doit être préférée sur le plan fonctionnel à la colectomie totale, en particulier chez des patients ayant une fonction anale déficiente ou lorsque l’anastomose doit porter sur le moyen rectum. La colectomie totale est indiquée en cas de lésions coliques ischémiques pré-perforatives ou en cas de cancers synchrones. Ces techniques sont d’autant plus intéressantes que l’espérance de vie paraît courte du fait de l’extension tumorale.
Perforation : l’existence d’une péritonite (1 à 8% des cas) est responsable d’une mortalité très élevée.

Recommandations :
En cas de perforation in situ : la résection est effectuée sans rétablissement de la continuité digestive du fait de l’absence de préparation ou de l’existence d’une péritonite.
En cas de perforation diastatique : le traitement de choix est la résection de la tumeur, sans rétablissement de la continuité. Le traitement de la perforation dépend de l’aspect du côlon sur lequel elle survient :
- extériorisation en stomie si le côlon droit n’est pas ischémique,
- résection avec colectomie totale ou subtotale en cas d’ischémie.

2 Les facteurs de pronostic utiles à la décision thérapeutique

2.1 Les facteurs histo-pronostiques déterminants sont : le niveau d’invasion de la tumeur dans la paroi, l’extension ganglionnaire (dont l’importance est majeure pour la décision de traitement adjuvant) et le caractère complet ou non de l’exérèse chirurgicale.
La classification TNM est la seule à faire l’objet d’un consensus international. Elle décrit mieux que les autres classifications le degré d’envahissement de la tumeur et des ganglions régionaux.

2.2 L’évaluation de la maladie résiduelle relève d’une synthèse entre les comptes rendus opératoire et histologique.

2.3 Les anomalies génétiques détectables par les techniques de biologie moléculaire sont en cours d’évaluation.

Recommandations :
L’étude anatomopathologique de la pièce d’exérèse est capitale pour l’évaluation du pronostic et la décision thérapeutique. Les éléments figurant dans la conclusion de l’examen anatomopathologique doivent préciser l’état des limites d’exérèse chirurgicales, le type histologique du cancer, son niveau d’invasion pariétale et le nombre de ganglions métastatiques selon la classification TNM.
L’analyse de tous les ganglions lymphatiques présents sur la pièce est indispensable; leur nombre ne devrait pas être inférieur à 8. En cas de problème d’identification de ceux-ci, des méthodes particulières de fixation peuvent être mises en oeuvre.
Les études de biologie moléculaire sont à encourager. Afin de les rendre possibles, un prélèvement de tumeur pour congélation est souhaitable, ainsi que l’utilisation de fixateurs tels que le formol ou la fixation d’un fragment tumoral en éthanol.

3 Les traitements adjuvants

3.1 chimiothérapie adjuvante systémique : elle est envisagée après chirurgie à visée curative.

Au stade III : l’association 5FU-Lévamisole pendant 1 an a été supplantée par les associations de 5FU et d’acide folinique (FUFOL) pendant 6 mois (schémas mensuels). Par rapport à la chirurgie seule, tous les essais contrôlés concluent à une augmentation de la survie globale de 10 à 15% à 5 ans. L’association FUFOL pendant 6 mois est au moins aussi efficace que l’association 5 FU-Lévamisole pendant un an.
Au stade II : peu de travaux ont étudié avec une puissance suffisante les patients à ce stade. Une récente méta-analyse ne montre qu’une amélioration non significative de survie de 2% à 5 ans dans le groupe recevant la chimiothérapie.

3.2 Chimiothérapie locorégionale : réalisée en post-opératoire immédiat, elle n’entraîne qu’une faible augmentation de la survie lorsqu’elle est réalisée seule.

Recommandations :
Une chimiothérapie adjuvante de 6 mois par FUFOL doit être réalisée au stade III UICC (Dukes C) chaque fois qu’il n’y a pas de contre-indication. Elle doit débuter dès que l’état du patient le permet, en tout cas avant le 35ème jour post-opératoire.
Il n’y a pas d’indication à prescrire de chimiothérapie adjuvante dans le stade II UICC (Dukes B) hors essai thérapeutique.
La tolérance de la chimiothérapie doit faire l’objet d’un compte-rendu. Le schéma d’administration, les doses administrées et les dates de traitement doivent être mentionnés dans le dossier médical.
La participation aux essais thérapeutiques est vivement recommandée.


Que faire après exérèse à visée curative d’un cancer du côlon ?

Cette question concerne l’adénome transformé et le CC réséqués à titre curatif.

1 Exérèse d’un adénome transformé

On entend par adénome transformé (6% des CCR) tout adénome contenant un foyer localisé ou étendu d’adénocarcinome quel que soit le niveau d’infiltration. Si celui-ci ne dépasse pas la musculaire muqueuse, il s’agit d’un carcinome intra-muqueux. Au-delà de la musculaire muqueuse, il s’agit d’adénocarcinome invasif. Le risque d’extension ganglionnaire ou métastatique n’existe pas pour les carcinomes intra-muqueux.

Recommandations :
La polypectomie endoscopique est le traitement adéquat et suffisant de l’adénome transformé s’il est intra-muqueux, et si l’exérèse est complète.
La polypectomie endoscopique est suffisante en cas d’adénocarcinome invasif si tous les critères suivants sont réunis : exérèse et examen histologique complets, cancer bien ou moyennement différencié grade I ou II, absence d’embols lymphatiques caractéristiques et marges de sécurité supérieures à 1 mm. Si un seul de ces facteurs manque, ou en cas d'adénome plan il faut réaliser une colectomie segmentaire respectant les règles carcinologiques. Le risque opératoire doit être confronté au risque évolutif de l’adénome transformé.
En cas de polypectomie endoscopique, une coloscopie de contrôle est recommandée à 3 ans dans tous les cas, et à 3 mois pour vérifier la valeur de l’exérèse en cas de carcinome invasif.

2 Surveillance après exérèse curative d’un cancer du côlon ?

Elle a pour objectif d’augmenter la survie :
- par la recherche d’adénomes et de CCR métachrones,
- par la découverte de récidives à un stade le plus précoce possible permettant une deuxième résection à visée curative.
En l’absence d’étude randomisée démontrant son efficacité, l’utilisation de l’ACE n’est pas recommandée et reste optionnelle en attendant le résultat des essais thérapeutiques. Les autres examens biologiques sont sans intérêt.

Recommandations :
La surveillance s'exerce, chez des patients capables de supporter une réintervention, selon le rythme suivant :
- examen clinique tous les 3 mois les deux premières années, puis tous les 6 mois pendant 3 ans,
- échographie abdominale tous les 3 à 6 mois pendant les trois premières années, puis annuelle pendant 2 ans,
- cliché pulmonaire annuel jusqu'à 5 ans.
- coloscopie à 3 ans, puis tous les 5 ans si elle est normale. Si la coloscopie initiale a découvert 3 adénomes ou plus, dont l’un de plus d’un cm ou présentant un contingent villeux, la surveillance sera effectuée à 1 an. Après 75 ans, et en cas de coloscopie normale, le jury propose l’arrêt de la surveillance endoscopique, cette notion devant être nuancée en fonction de l’état clinique et de l’espérance de vie.
Il est fortement recommandé d’inclure des patients dans des études prospectives randomisées évaluant l’efficacité de la surveillance en termes de réduction de mortalité, de qualité de vie et de coût-efficacité.


Quel traitement proposer dans les cancers coliques localement avancés et/ou métastatiques ?

1 Traitement chirurgical des métastases (synchrones et métachrones)

Les métastases sont observées dans 40 à 60% des cas, elles sont synchrones dans 25% des cas.

1.1 Les métastases hépatiques (MH)

Elles sont les plus fréquentes. En l’absence de traitement, la survie à 5 ans est nulle. Après résection chirurgicale, la survie à 5 ans est de 13 à 25%.

Recommandations :
L’exérèse des MH doit être discutée systématiquement, en réunion pluridisciplinaire, chez les patients en bon état général et dont la tumeur initiale a été traitée dans un but curatif.
La recherche d’autres localisations métastatiques (TDM abdomino-pelvienne et thoracique) ou d'une récidive locale doit être effectuée au préalable.
La résection des MH ne doit être envisagée que dans un but curatif. Les résections palliatives n’apportent aucun bénéfice. Des exérèses étendues sont actuellement envisageables chaque fois que des lésions sont jugées techniquement résécables après une exploration morphologique hépatique.
Une marge de sécurité ( 1cm est nécessaire, chaque fois que possible.
En cas de métastases synchrones, l’intervention en 2 temps est préférable lorsque l’hépatectomie doit être étendue.

1.2 Les métastases extra-hépatiques avec ou sans métastases hépatiques synchrones

L’exérèse ne peut être envisagée que dans un but curatif. En cas de résection de métastases exclusivement pulmonaires, la survie à 5 ans est de 25 à 30%. En cas d’association de MH et de métastases pulmonaires, plusieurs interventions sont nécessaires ; il faut débuter par l’hépatectomie. Les carcinoses péritonéales localisées ne contre-indiquent pas une hépatectomie si elles sont réséquées en totalité.

1.3 Tumeur colique et métastases non résécables

La décision de colectomie repose sur une concertation médico-chirurgicale.

2 Traitement chirurgical des formes localement avancées et des récidives loco-régionales

2.1 Les formes localement avancées représentent 14% des cas (registre de la Côte-d’Or). Ces tumeurs envahissent les organes ou les structures de voisinage. Cet envahissement peut être tumoral ou inflammatoire. Seul l’examen anatomopathologique peut en déterminer la part respective.

Recommandations :
Nécessité d’une exérèse monobloc des organes supposés envahis sans dissection ni rupture de la pièce car le risque de dissémination intrapéritonéale et l’aggravation du pronostic sont bien établis. Les biopsies sont prohibées. Ce type de chirurgie, en l’absence d’un traitement efficace, semble justifié même chez les sujets âgés et même si l’exérèse est palliative. Elle doit être préférée aux dérivations internes.

2.2 Les récidives locorégionales (RLR) apparaissent dans environ 15% des cas. Le taux de résécabilité n’excède pas 20%. Le taux de résection curative est de l’ordre de 0,2 à 2%.

Recommandations :
La résection des RLR isolées doit être réalisée chaque fois que possible. Les résections palliatives n’améliorent pas le pronostic mais peuvent améliorer le confort du patient. En cas de résidu tumoral, celui-ci est clippé pour une éventuelle radiothérapie postopératoire.

3 Place de la chimiothérapie dans les cancers coliques localement avancés et/ou métastatiques

Par rapport au traitement seulement symptomatique, la chimiothérapie améliore la survie et le confort de vie des patients. En première ligne, une chimiothérapie immédiate est supérieure à la chimiothérapie instaurée à l’apparition des symptômes. En deuxième ligne, le traitement optimal, et notamment la place des nouvelles molécules, ne sont pas définis.

Recommandations :

- choix d’un protocole de chimiothérapie peu toxique et réalisable en ambulatoire ; le protocole LV 5FU2 par exemple répond à ces critères,
- abandon de la chimiothérapie ou changement de protocole en cas de progression tumorale après 2 mois,
- inclusion dans un essai thérapeutique chaque fois que possible,
- recours à un avis chirurgical en cas de réponse favorable à la chimiothérapie et maladie touchant un seul organe,
- en cas de progression tumorale, le maintien par l’équipe d’un traitement symptomatique et d’un soutien psychologique est indispensable. A toutes les étapes, la qualité de vie doit être privilégiée. En cas de situation dépassée, les soins palliatifs doivent être envisagés. La prise en charge de la douleur et l’accompagnement du malade et de sa famille sont essentiels.

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