Médecine chinoise : une autre approche du cancer

Comment les médecins asiatiques traditionnels perçoivent-ils la maladie cancéreuse ? A l’heure où l’acupuncture et la phytothérapie chinoise aident à supporter les effets secondaires des traitements classiques, focus sur cette médecine énergétique.
yin et yang

Depuis quelques années, la médecine chinoise fait une entrée discrète mais remarquée dans les hôpitaux occidentaux.  En Allemagne surtout, mais aussi en France. A la Pitié-Salpêtrière notamment (où une consultation d’acupuncture est proposée depuis près de vingt-cinq ans), les journées d’études et de formations menées par des équipes médicales de Honk-Kong à l’attention de leurs homologues français se multiplient. Le but avoué est même de créer très prochainement un centre de recherche clinique et d’évaluation de ces approches. L’acupuncture, mais aussi les herbes médicinales, le massage, le Gi-Gong… autant d’applications variées pour une seule et même médecine, tout à fait différente de la nôtre, qui se définit en un seul mot : « Energie ».

Le cancer, « énergie révoltée »

         Pour les médecins chinois, la santé provient de l’équilibre  renouvelé du Yin-Yang, deux courants d’énergie intérieure opposés et complémentaires; la maladie, elle, naît d’un déséquilibre du Yin-Yang. Dans ce cadre, le médecin est vu comme un régulateur d’énergie qui fait un travail de prévention et de réparation des flux, ainsi que nous l’explique Dazhao Lin, médecin traditionnel: « à travers le travail sur les méridiens et les points énergétiques, on vise à éliminer les blocages, canaliser les stagnations, réparer les baisses d’énergie ». 
         En général nos énergies, qui sont en lutte permanente, parviennent toujours à se rééquilibrer et à retrouver l’ordre interne. Mais parfois, le chaos demeure. «Le cancer, nous l’appelons « l’énergie révoltée », explique Dazhao Lin. C’est une sorte du mutin dans le navire qui déclare la guerre. Lorsqu’il y a une bonne circulation énergétique, celui-ci ne peut pas s’installer et fomenter la rébellion. En ce sens, nous considérons que sans le savoir nous échappons chaque jour à de nombreux cancers ».

Des émotions en excès

         Autre particularité de cette approche : si elle envisage de nombreux facteurs pathogènes externes (pollution, alimentation inappropriée, données géo-climatiques de l’habitat et de l’environnement…), l’importance qu’elle accorde aux dysfonctionnements internes est essentielle.  Parmi ceux-ci, les émotions l’emportent. « Chaque émotion est liée pour nous à un organe qui est aussi un foyer d’énergie, explique Dazhao Lin. Ainsi la colère relève du foie, la peur du rein, l’inquiétude du pancréas…Si une émotion dépasse la limite habituelle et s’intensifie à l’excès, elle peut déstabiliser le Yin-Yang et permettre à l’énergie révoltée de s’installer. »
         La médecine chinoise surveille essentiellement les organes, foyers d’énergie et leurs territoires qu’ils génèrent et régénèrent. Si «l’énergie révoltée apparaît sur l’un de ces foyers, elle peut causer une plus grave perturbation de l’ensemble », explique le médecin chinois. 

Guérir, c’est faire cesser le déséquilibre

Dans cette vision, annihiler l’énergie révoltée ne suffit pas. « Si celle-ci est arrachée comme une dent malade, le patient n’est cependant pas considéré comme guéri, précise Dazhao Lin. Aux yeux de la médecine chinoise, c’est une simple amputation qui ne changera rien si le déséquilibre du Yin-Yang et sa cause ne sont pas corrigés ». 
Comment guérir alors ? « Pour sortir de la guerre contre l’énergie révoltée, il faut ouvrir des pourparlers et parvenir à savoir quelles conditions celle-ci pose », explique-t-il dans une métaphore. Intervient alors le médecin qui propose « sa médiation pour rétablir l’ordre». Pour ce faire, et contrairement à l’approche occidentale, celui-ci ne va pas centrer sa thérapie sur la partie malade mais sur « l’être qui souffre de cette maladie ». 
         La thérapeutique repose ensuite sur plusieurs piliers : analyse de l’hygiène de vie du malade (alimentation, émotions, environnement…), travail sur les points d’énergie avec l’acupuncture mais aussi via le massage et la thérapie manuelle, phytothérapie (des compositions individualisées d’herbes et plantes séchées…). « Nous pouvons intervenir à différentes étapes, détaille le médecin chinois : avant le traitement, à l’annonce de la maladie, pour équilibrer l’état émotionnel ; pendant les traitements, pour aider à maintenir ou rétablir une bonne circulation d’énergie sur les cinq mouvements d’énergie principaux ; enfin après les traitements, pour repérer dans l’hygiène de vie les facteurs probables qui pourraient mettre l’équilibre du Yin-Yang en péril ».

Aider lors des traitements

         Actuellement, la médecine chinoise est surtout perçue en occident comme une aide complémentaire notable, notamment pour diminuer les effets secondaires des chimiothérapies et radiothérapies. Dazhao Lin avoue recevoir une majorité de patients en traitement qu’il soulage des effets les plus toxiques des traitements (nausées, fatigue…). Une récente étude de l’Université de Yale vient d’ailleurs de montrer l’efficacité d’un  remède traditionnel chinois composé de quatre herbes et fruits pour atténuer les désordres intestinaux provoqués par les chimiothérapies, notamment chez les patients atteints de cancer colorectal. Un pas de plus sur ce chemin de coopération sino-occidentale porteuse d’espoir.
Pascale SENK

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